L' actu
du SNEA
Comme toute association loi 1901, une école d’art associative peut avoir recours à des travailleurs indépendants pour des prestations qu’elle n’est pas en capacité de réaliser elle-même.
Le micro-entrepreneur doit avoir un réel savoir-faire dans une domaine spécifique déterminé (musique électroacoustique, théâtre nō, nettoyage de locaux, rénovation…) et fournir les moyens nécessaires à la réalisation de sa prestation. S’il utilise en partie le matériel de l’association ou ses locaux, une convention de mise à disposition doit être conclue. Il devra, a minima, apporter son matériel personnel : en aucun cas le micro-entrepreneur ne peut intervenir dans les locaux de l’association et n’utiliser que le matériel de celle-ci. Il devra être réellement indépendant : mis directement en contact avec le public ciblé, il choisit librement le contenu de son activité et les modalités de sa prestation (lieu, matériel, horaires…) et ne reçoit aucune instruction de l’association, qui ne supervise pas son travail. Il ne s’intègre pas dans une équipe ou un organigramme et, s’il est enseignant, suit son propre projet pédagogique. Sa rémunération est globale et forfaitaire : la facture ou le mémoire ne peut faire apparaître une rémunération selon un nombre d’heures.
Il s’agit donc d’apporter une expertise extérieure et ponctuelle dans un domaine où l’association ne possède pas déjà les compétences en interne.
En aucun cas il ne peut s’agir d’une solution alternative au salariat pour assurer à moindre coût l’ensemble des missions que se donne l’association : il s’agirait alors de travail dissimulé.
Le travail dissimulé, aussi appelé travail au noir, est une pratique illégale qui consiste à ne pas déclarer un salarié. L’employeur évite ainsi de payer les cotisations sociales et l’employé se voit privé de ses protections et droits sociaux.
Or, quelle que soit la dénomination de la convention passée entre l’enseignant et l’association, il existe un contrat de travail (et donc une situation de salariat) si :
– critère économique : l’indépendant se retrouve à ne travailler que pour un seul client qui lui accapare tout son temps, l’empêchant ainsi de développer son réseau de clients, ou encore lui interdisant explicitement de travailler pour d’autres clients ;
OU
– critère juridique : il existe un lien de subordination entre l’indépendant (l’enseignant) et son client (l’association).
Il existe en effet une équivalence quasi-mathématique entre contrat de travail et lien de subordination :
– s’il y a un contrat de travail, alors il y a un lien de subordination ;
– s’il y a un lien de subordination, alors il y a un contrat de travail.
Un contrat de travail qui n’est pas écrit est réputé à durée indéterminée et à temps plein.
Il n’est pas nécessaire que le lien de subordination soit explicitement écrit dans le contrat de prestation signé entre l’indépendant et le client : pour le juge, c’est la relation concrète entre l’entreprise et le prestataire qui permet d’établir ou non le lien de subordination.
À titre d’exemple, chacun des éléments suivants caractérise l’existence d’un lien de subordination :
– l’association vous impose les élèves (vous ne pouvez pas entièrement les choisir vous-mêmes) ;
– vous n’êtes pas libre de choisir votre lieu de travail ;
– vous n’êtes pas libre de fixer vos jours et heures de travail et d’en changer ;
– l’association vous impose les périodes de congés ;
– c’est l’association, et non vous, qui fixe les tarifs des cours ;
– vous êtes intégré dans une équipe ;
– l’association vous donne un cahier des charges ou des instructions ;
– l’association désigne une personne pour superviser votre travail ;
– l’association a employé ou emploie des salariés pour réaliser la même activité que vous ;
(…)
Dès lors qu’il estime que sa relation avec l’association est en réalité une relation salariée, l’enseignant micro-entrepreneur peut (doit) saisir le conseil de prud’hommes, avec l’appui et après conseil de son syndicat.
En cas de requalification par les prud’hommes de la relation en contrat de travail, les conséquences pour l’association seront notamment les suivantes :
– régularisation auprès de l’URSSAF des cotisations sociales salariales et patronales dues, sur les 3 dernières années, et versement des cotisations sociales à venir dans le cadre du contrat de travail ;
– si la relation entre vous et l’association a pris fin, reconnaissance d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec versement de dommages-intérêts ;
– application de la convention collective Éclat (édition des bulletins de paie, application de la rémunération minimale conventionnelle…) pour le futur mais également pour les années précédentes ;
Ainsi que, en cas de reconnaissance du délit de travail dissimulé :
– paiement d’une indemnité forfaitaire à l’enseignant équivalente à 6 mois de salaire ;
– sanctions pénales : jusqu’à 225 000 € d’amende et 3 ans de prison, exclusion des marchés publics, dissolution ou fermeture temporaire, interdiction d’exercer, confiscation du matériel professionnel, placement sous surveillance judiciaire…
– sanctions civiles ou administratives : paiement de toutes les contribtions et cotisations dues au titre de ce travail, assorties de majorations et pénalités, etc.
Il est bien évident que l’enseignant qui fait valoir ses droits ne porte aucune responsabilité quant aux conséquences pour l’association, qui ne peut s’en prendre qu’à elle-même.
Rapprochez-vous de votre syndicat afin d’être conseillé au mieux en fonction de votre situation personnelle.
Informez l’association des risques encourus.
N’attendez pas d’être en difficulté (maladie, etc.) pour agir.
Rédaction : Jean-François Lagrost